de l'intérieur d'une communauté

Quels que soient les groupes sociaux, on ne voit souvent d'eux que la partie « marketing ». Celle qui est bien présentable et que l'on souhaite mettre en évidence, au mépris souvent de la réalité. Ce blog, qui se revendique comme un blog d'information, va tenter de présenter la vie de la communauté hellénique de Lyon par ceux qui la vivent de l'intérieur.
J'ai connu deux hommes qui ont dignement représenté la communauté hellénique : monseigneur Vlassios et le père Athanase Iskos. Ils n'ont jamais eu à rougir de ce qu'ils ont fait ou dit et ont laissé une communauté respectée et respectable. Le contraste pourra paraître saisissant entre les 50 ans qui viennent de s'écouler et ce qui se passe depuis plus de six ans, mais si l'on veut rester fier de ce que l'on est, il ne faut pas hésiter à prendre ses distances lorsque ce que l'on voit s'éloigne de nos idéaux.
Dans un premier temps, je vais raconter une histoire au travers de courriers échangés et de documents, qui seront tous reproduits. Dans un second temps, je débattrai autour des questions qui seront posées à mon adresse mail : jeanmichel.dhimoila@gmail.com .
La communauté hellénique de Lyon étant une association cultuelle, loi 1905, les références au culte seront nombreuses et indispensables pour comprendre le sens de ce qui est recherché, et malheureusement parfois ses dérives.

Bonne
lecture à tous

samedi 29 novembre 2014

144- L'esprit qui nous habite



On ne compte plus les nouveaux Abraham qui décident de tuer leur enfant, ou un proche, afin de répondre à un mystérieux appel divin. L'actualité tragique du 29 septembre dernier n'en est malheureusement que l'un des innombrables exemples. Ces personnes se trouvent entraînées dans un élan de folie mystique, qui n'a de mystique que l'insondable égarement dans lequel se trouvent plongés leurs protagonistes. 

La frontière est ténue entre la quête mystique et la folie. Et ce n'est pas notre ami Christos Koutsiouris, égaré depuis longtemps dans les méandres de la confusion de l'esprit, qui pourra me contredire. Nous avions constaté qu'il ne s'était pas arrangé depuis que le métropolite Emmanuel Adamakis lui avait imposé les mains pour l'ordonner lecteur. Mais nous avions conscience, à sa décharge, que ce n'est pas sur la tête que le métropolite s'est spécialisé pour imposer les mains... Ce qui fait que nous comprenons qu'il ait eu à subir des interférences dans la venue des dons de l'Esprit.

Les scènes dont il nous a gratifié dimanche dernier, digne des meilleurs moments de L'exorciste, et qui lui valent aujourd'hui d'être poursuivi pour violences volontaires, sont la marque de ces esprits égarés, façonnés par une religion qu'ils ont dénaturée par leur manque de discernement et par leurs propres convoitises.

Je reviendrai sur le détail de ce qui s'est passé lorsque l'instruction de la plainte sera avancée,
 


mais la vidéo ci-dessous permet déjà de se faire une idée du personnage qui vient chanter les louanges de Dieu et se retrouve à vociférer tel un possédé au milieu d'une assistance médusée. La scène se déroule entre 14'15'' et 19'.



Il convient donc de revenir sur les éléments qui peuvent nous permettre d'échapper aux pièges de ces illusions, afin qu'elles ne nous conduisent pas à devenir les jouets de nos propres tourments.


La première des choses à garder à l'esprit, celle que les moines placent au-dessus de l'ascèse, est le contrôle de ses pensées. Les empêcher de divaguer est un exercice particulièrement difficile à appliquer. Très nombreux sont les moines qui tentent d'essayer de les ancrer dans la prière, sans jamais y parvenir. Pourtant, ce contrôle est un exercice indispensable pour garder sa raison et sa liberté d'action.

Jean de la Fontaine disait, dans l'une de ses fables les plus connues : Hé ! bonjour Monsieur du Corbeau. Que vous êtes joli ! que vous me semblez beau ! Sans mentir, si votre ramage se rapporte à votre rason, vous êtes le phénix des hôtes de cette église. Pour conclure en disant que tout flatteur vit aux dépens de celui qui l'écoute.

Personnellement, j'apprécie toujours quand on me dit que j'écris bien, même si je sais que sans le travail de mes trois relecteurs, les textes n'auraient pas la même finition. Mais je sais aussi que si je prête attention à cette remarque, je serai déçu lorsque j'entendrai la remarque inverse. Et, ainsi, je m'attacherai davantage à ceux qui me flattent, ce qui me conduira inexorablement à perdre mon objectivité.

Cet exemple anecdotique permet d'appréhender le fait qu'il est important de rester lucide en toutes circonstances. Ce qui implique un détachement indispensable devant le regard que les autres portent sur nous.

C'est ainsi que, lorsque le père Nicolas Kakavelakis dit à Caroline, à mon propos, lorsque je restaurais son appartement : Jean-Michel a l'esprit du Christ [...silence...] Il va se faire crucifier ! je n'ai pas cru un instant que cela pouvait être vrai. Je n'avais aucune intention de l'accepter. Le Christ a l'esprit du Christ, et Jean-Michel celui de Jean-Michel. 

Je n'ai pas davantage cru que j'étais Jean-Baptiste lorsqu'il a voulu s'offrir ma tête sur un plateau. 

La culture judéo-chrétienne considère que le prophète Élie, enlevé vivant au ciel sur un char de feu, doit revenir à la fin des temps (Malachie 4, 5 ; Matth. 17, 11).  Au point que nombreux étaient les juifs à penser que le Christ était Élie qui était revenu (Mc 8, 27-28). Il est vrai qu'à choisir, entre Jean-Baptiste qui s'est fait décapiter (Mc 6, 27-28), et Élie qui a fait décapiter 450 faux prêtres (1Rois 18, 40), j'aurais une petite préférence pour le rôle du second. 

Mais, justement, si je me persuadais d'être dans le rôle d'Élie, j'aurais perdu de vue le plus important : je suis Jean-Michel. Je ne parle pas de s'inspirer de conseils de sagesse, dont l’Évangile, par exemple, regorge, mais de croire que nous sommes là pour reproduire ce que tel ou tel a réalisé. C'est la liberté dont je dispose en tout temps qui donne son sens à ce que je fais et la valeur de ce que je suis. C'est elle qui me donne ma capacité à accepter ce que je souhaite, et à refuser de me soumettre à ce que je ne veux pas. Il en est de même pour chacun. Il n'y a pas besoin de se croire revêtu d'une mission spéciale pour être quelqu'un de spécial. Ni même d'avoir la volonté ou la conscience d'appartenir à un peuple élu. Je pense même que nous cessons de l'être le jour où nous nous attachons à vouloir reproduire ce qu'était tel ou tel, car alors nous ne pouvons plus accomplir ce que nous sommes, ni dans les choses importantes, ni dans les choses simples de la vie de tous les jours.

Lorsque l'Esprit-Saint est descendu sur les Apôtres réunis, il ne s'est pas substitué à l'esprit qui était le leur, mais il a guidé leur cœur et les a remplis de sagesse.

Tous les hommes que nous considérons aujourd'hui comme grands, au sein de l’Église, ne le sont devenus que parce qu'ils sont restés eux-mêmes, sans chercher à imiter quelqu'un. Grands et proches de Dieu par la force de leur liberté, qu'ils ont utilisée pour aller au bout de leur quête de justice et de vérité.

jeudi 20 novembre 2014

143- Katyusha



La fête nationale grecque, le 25 mars, tombe en même temps que la fête patronale de notre église, dédiée à l'Annonciation. A la fin de la liturgie, traditionnellement célébrée le dimanche le plus proche, ont lieu les incontournables discours des officiels. Moment fastidieux s'il en est, où l'on espère parfois entendre une petite touche de fantaisie qui viendrait l'égayer. 

Discours conclu par l'hymne national grec qui résonne toujours avec un enthousiasme certain.

Cette année, porté par cet élan populaire qu'il eut envie de prolonger, le père Nicolas Kakavelakis dit alors : Bon, maintenant, je vais vous interpréter l'hymne de la communauté ! Le silence de consternation qui s'abattit alors sur l'église n'eut rien à voir avec le fait qu'il faudrait encore attendre pour aller boire le café. Ni même qu'il faudrait subir de nouveau ses piètres qualités vocales. Ce moment de fantaisie que nous aurions souhaité dans son discours venait au plus mauvais des moments. Peut-on réellement placer quelque chose après l'hymne national ? Une chose qui viendrait le parachever ? Et qu'était donc ce mystérieux hymne dont jamais personne dans l'assistance n'avait entendu parler ?

Le père Nicolas se mit alors à interpréter la célèbre chanson Katyusha, arrangée avec des paroles de sa composition. Pour comprendre la portée de son geste, il faut revenir aux origines de ce chant.

Katyusha est un chant d'amour russe qui traite de l'histoire entre une jeune fille et un soldat parti au front. Elle a été intégrée aux classiques du répertoire des chœurs de l'Armée Rouge.



Tiré de cette chanson, le nom Katyusha servit à baptiser un lance-roquettes de l'armée soviétique, plus communément appelé Orgue de Staline.

Les Maquisards italiens en reprirent la musique pour y adapter leurs propres paroles : Fischia il vento devint ainsi l'un des hymnes des Partisans italiens en 1943, aux côtés de Bella ciao.

A peu près à la même époque, le front de libération nationale grec (EAM), adapta lui aussi ce chant avec des paroles de circonstance.



J'ignore d'où le père Nicolas avait puisé l'idée de se l'approprier à son tour pour en faire l'hymne de la communauté, et l'ajouter à l'hymne national grec pour venir conclure la célébration de la fête nationale. Je sais juste que plusieurs personnes quittèrent alors l'église, scandalisées de ce à quoi elles assistaient.

Mais nous n'étions pas au bout de nos surprises. Il s'avéra en effet que le père Nicolas, également instituteur de grec, avait pris l'initiative d'enseigner ce chant aux enfants, nouveaux partisans d'un monde qu'il avait entrepris de formater suivant ses délires.

C'est ainsi qu'il avait distribué cette feuille aux enfants, pour qu'ils en apprennent le texte en guise de devoir.



Texte qui pourrait se traduire par :

Viens toi aussi dans notre communauté
Si tu aimes ta patrie
Une étreinte affectueuse t'attend ici
Tu trouveras amis et sympathie

Notre association est grecque
Elle se bat pour sa religion et ses valeurs
Quand tu viendras tu seras notre frère
A Lyon tu trouveras le réconfort

Notre communauté se trouve en France
Elle conserve nos racines vivantes
Elle est la Grèce et notre église
Et avant tout, notre devoir sacré.

Les intentions décrites par ces paroles sont louables, mais le quotidien de la Communauté, relaté dans ce blog, est là pour nous rappeler à quel point elles sont éloignées de la réalité.

S'il est vrai que les enfants restent des cibles privilégiées pour les adeptes des conditionnements de toutes sortes,



et ce jusqu'à ces dernières semaines, comme le remarquait fort à propos Olivier Beruyer sur son blog, au sujet du conditionnement des enfants Ukrainiens, imprégnés de symboles nazis,


il n'en reste pas moins que  les parents de l'école grecque de Lyon n'avaient aucune envie d'être confrontés à de telles pratiques.

Quelles que soient les sympathies des familles pour tel ou tel courant de pensée, aucune n'envoie ses enfants à l'école grecque pour qu'ils y subissent un conditionnement. Et adapter un chant Partisan, en faire l'hymne de la communauté et l'inculquer aux enfants était ressenti comme un conditionnement dépassant nos valeurs culturelles. Et cela n'avait pas sa place dans notre école. Ajouté à beaucoup d'autres choses, cet apprentissage conduisit les parents à écrire au Coordinateur Européen des programmes scolaires grecs, afin de se plaindre des méthodes du père Nicolas.

L'affaire remonta au sommet du ministère de l'éducation grec, qui nomma un nouvel enseignant à Lyon. Non pas en remplacement du père Nicolas, car ce dernier fit intervenir ses soutiens cléricaux pour sauver son poste, mais pour créer ce qui est devenu en octobre la nouvelle école grecque de Lyon. Nous aurons prochainement d'en reparler.


Dans la culture judéo-chrétienne, la vie d’Élie et de son disciple Élisée ont une place prépondérante. Si, dans la vie d’Élie, on peut retenir qu'il fit égorger sans pitié 450 faux prêtres (1Rois 18, 40), celle d’Élisée pourrait trouver son point culminant dans la résurrection du fils de la veuve qui l'hébergeait. Lorsque Élisée arriva dans la maison, voici, l'enfant était mort, couché sur son lit. Élisée entra et ferma la porte sur eux deux, et il pria l'Éternel. Il monta, et se coucha sur l'enfant ; il mit sa bouche sur sa bouche, ses yeux sur ses yeux, ses mains sur ses mains, et il s'étendit sur lui. Et la chair de l'enfant se réchauffa. Élisée s'éloigna, alla çà et là par la maison, puis remonta et s'étendit sur l'enfant. Et l'enfant éternua sept fois, et il ouvrit les yeux. Élisée appela Guéhazi, et dit : Appelle cette Sunamite. Guéhazi l'appela, et elle vint vers Élisée, qui dit : Prends ton fils ! (2Rois 4, 32-36).

Cette image de la résurrection de l'enfant a souvent été reprise comme la préfiguration du Christ s'incarnant pour se mettre à l'échelle de l'homme et lui insuffler la vie.

Mais il est également possible d'y voir l'image d'un parent s'abaissant au niveau de conscience de son enfant pour le former et l'éduquer. Une pédagogie de laquelle peut naître la vie par le souffle du savoir que l'on transmet. Non pas un savoir inaccessible et intellectuel, mais mis à la portée de l'enfant, hors de toute forme de conditionnement.